Zone grise
C’est la peur qui domine.
C’est encore plus vrai quand cette phrase esseulée en haut d’une page immaculée ne trouve aucun écho dans l’instant qui suit. Et le pointeur qui clignote avec arrogance semble compter les secondes qui passent en se moquant de mon désarroi.
Je ne vais pas y arriver.
Ces mots revenaient sans
cesse m’encombrer l’encéphale durant la " crêpe party " à laquelle
j’étais invitée hier soir. J’ai pourtant bien essayé de m’intéresser
aux multiples discussions. Mais tout ce à quoi je pensais se trouvait
sur quelques A4 pliés au fond de mon sac. Je ne vais pas y arriver.
C’est presque beau non ? Ce petit côté passionnel…
La peur trouve son origine dans la récurrence. Et la récurrence devient insoutenable.
Celle
des mots. Des miens, des tiens, de ce qu’on en fait, de cet espèce de
ping-pong scriptural qui - au choix - excite nos egos respectifs ou
nous plonge dans une tristesse sans fond.
Celle des larmes épuisantes, celle des questionnements insensés.
Celle des nuits lourdes où j’arrive presque à sentir ta chaleur.
Celle de tes faiblesses infinies.
Celle de ma colère.
Celle des bières que tu t’enfiles.
Celle de mon euphorie désespérante.
Celle de tes concepts érodés.
Alors ?
Alors je vais te dire.
Le temps est une pute et je l’achète avec des RTT dans le but de désagréger des monolithes.
Bien malgré moi.
Et je vais dire encore.
Les mots sont créateurs de sentiments. Les marches vers le sommet de l’adoration.
Je baise mon double pathologique et j’aime une icône.
Mes perceptions sont altérées à cause des neurones grillés.
Mon masque est fêlé depuis longtemps.
Et je dis ça comme je file des gifles qui ne peuvent pas atteindre leur cible.
Parce que je vais dire aussi.
Si l’anticipation est ta
compagne, moi je la traîne comme un boulet. Elle me rappelle combien il
est inutile de revenir sur une introduction alors que tu as déjà mis un
point final à la conclusion.
Mon esprit, même haletant, même malade, reste façonnable.
Alors
façonne. Jouons selon tes règles. J’essaie de me persuader que leur
simplicité relative me convient. Rejoins-moi dans la zone grise. Elle
est à la fois la fin et le commencement.
Jusqu’à faire sauter le dernier pion.
Jusqu’au bout de cette autoroute vers l’enfer.
Jusqu’à ce que le soleil nous aveugle.
Tellement qu’on pleurera pour un peu de pluie.
Où es-tu ?
On attend sous un ciel de suie
Que les dieux nous métamorphosent
Et ça sent le sexe transi
Sous le rose de nos ecchymoses
On attend sous l’œil du cyclone
L'ouragan de nos souvenirs
Tous ces milliers de bouts d'icônes
Dans nos boîtes crâniennes en délire
On pleure pas parce qu'un un train s'en va
On reste là sur le quai
On attend *
*Libido Moriendi, Thiéfaine pour le souvenir de jours peu compliqués.