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apocryphe
27 novembre 2008

Et l'heure tourne

Un jour, il ne me restera plus que cette pathétique illusion du partage. D’absconses déclarations fleurissant à l’aveuglette sur le tapis blanc. Comme des milliers de petits cataplasmes obsolètes. Infecte quête cyclique. Tout l’alphabet revient crier son incompréhension sans relâche, pleurer toute sa rage sur mes dimanches solitaires.

Il sent bon l’introspection plaintive ce teasing. Attends, tu vas voir.

Endiguer le processus. Tentative 1327. Échec.

Même le chat semble éprouver de la compassion. Je peux lire ça dans son regard idiot. Et aussi –surtout me dirait-il- que c’est l’heure de sa pâtée. Béatitude, pourquoi donc es-tu partie comme une voleuse? Et l’heure tourne.

Dans ma tête, tout est intact. Ma tête, une obsidienne. (Ne cherche pas je voulais juste placer ce mot de manière congrue, parce que je l’aime bien, mais c’est un peu raté j’avoue.)

Avant tout ça… Dans mes orbites ça brûlait comme une forêt varoise en plein mois d'août et mon ravissement avait le débit d’Iguaçu. Avant… Faut vraiment arrêter avec cette putain de nostalgie. Ca pue le renfermé, on a pas pris l’air depuis si longtemps, des semaines, des mois. Deux corps arides devant les chroniques d’Henry-Jean Servat, vautrés dans l’intangible, ou le canapé Ikea si tu préfères. Chez nous, ça ne rigole pas, on leucotomise à l’emporte-pièce. On se pose des quintaux de questions existentielles. Est-ce que Samuel L. Jackson porte une moumoute dans Pulp Fiction ? Est-ce qu’on risque le choc anaphylactique en mangeant les croquettes de crevettes qui louent le premier étage du surgélateur depuis 6 mois ? Tu penses que Raymond et Roberto ont le même coiffeur ? Et l’heure tourne.

Avant tout ça… C’était le Carnaval de Rio tous les jours. La salle de bain sentait bon la chaussette humide (oui, celle-là même qui est sournoisement tombée derrière le sèche-linge, imagine les semaines d’angoisse accumulées par sa jumelle toute propre dans le tiroir) et la chambre ressemblait à une caravane de romanichelles.

Puis mes yeux secs contemplent les bocaux où j’ai tout rangé. Là, des petits bouts d’amour posent, momifiés à côté des journées exceptionnelles assoupies dans le formol. Des fioles d’élans passionnés. Il reste sûrement des poussières de sentimentalisme sous le canapé, mais j’avoue, je n’ai pas eu la force de vérifier. J’ai retrouvé un de tes cheveux dans ma brosse et je l’ai enroulé autour de mon doigt avant d’aller dormir. C’était le jour où j’ai failli me pétrifier en pensant que tu étais parti. Instinctivement j’ai vérifié si Michel était toujours dans la bibliothèque puis j’ai entendu la chasse d’eau et tout est rentré dans l’ordre. Je t’entends rire, comme j’aime te faire rire, comme j’existe dans ton rire. J’ai des relents d’ataraxie. Et l’heure tourne.

En réalité, ça n’est pas vraiment ça le problème. Le vrai problème, c’est quand on commence à compter les derniers euros (ou centimes d’euro quand c’est vraiment disette) au fond de son porte-monnaie (Vuitton, made in Istanbul) le 12 du mois, en se maudissant d’avoir acheté ces 2 jeans deux semaines plutôt (parce que trouver dans la même heure deux jeans qui ne font pas un vieux cul tout plat, ça n’arrive pas tous les jours).

Alors j’ai cherché une parade au débit de mon compte. Vous allez aimer, qu’ils disaient. J’ai rencontré Julien (qui ne s’appelle pas Julien mais préservons tout de même son anonymat.). Il ressemblait très fort à Jack Dawson, mais il bossait à l’usine et j’ai tout de suite su qu’on n’avait aucun avenir. Ensuite il y a eu Olivier, qui ne s’appelle pas non plus Olivier mais par égard pour sa femme et ses enfants, nous nous en tiendrons à ce pseudonyme. Puis Benjamin, qui m’a envoyé des sms qui ressemblaient puissamment aux dialogues de Nuits Blanches à Seattle pendant que je suis en train de suer sur les écrous de ma nouvelle étagère en kit. Frédéric, supporter de l’A.S Saint-Etienne, je l’ai laissé ciré le banc de touche (et ce n’est pas ce que tu crois) . Et enfin bomec75, qui s’appelait en réalité Gilbert, tu penses bien que j’ai même pas voulu qu’on soit juste amis.

Alors j’ai arrêté. Arrêté de penser que quelqu’un sera toujours là pour porter ma croix. Aussi parce qu’à la fin, j’ai une tête comme un compteur à gaz. Tous des Judas. Pas un seul Bill Gates (oui je sais ce que tu vas dire, mais je sais que toi aussi tu ferais bien abstraction de l’ingratitude de sa plastique), même pas un petit rentier.

J’évoque le sans toi, brièvement. J’imagine gambader hors de ce carcan souverain, exempt de tribut social. J’imagine la folie tentatrice tapie dans un coin de l’appartement, guettant la moindre brèche, m’insufflant d’immondes colères sous un rictus sadique.

Et j’imagine aussi rester assise par terre sans bouger. Jusqu’à ce que le frigo soit vide. En geignant comme un veau qui a perdu sa mère. Jusqu’à ce que Patrick Dempsey vienne me chercher. Ou que les voisins appellent la police.

Mais non. Esquissons encore un slow sur un vieil air de Dusty Springfield. Et patientons.

Vas-y, râle parce que j’ai par mégarde téléchargé Scarface en pakistanais. Comme ça je pourrai encore te maudire d’avoir ouvert trois bouteilles de Sprite en MEME TEMPS (+ la pénalité pour n’en avoir mis aucune au frigidaire.). Et non, on ne donne pas de thon en boîte à une plante carnivore, tu vas la tuer. Oui je sais, j’ai mangé tous les pepito et j’entend mon  gras du cul qui te dit d’aller te faire foutre. J’en profite pour te signaler qu’une pince a épiler n’est pas un tournevis de précision. Non, tu ne peux pas te curer les ongles avec non plus.

Et patientons.

Parce que tout ce que j’attends de toi, c’est que tu hérites de ce foutu million de dollars.

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